En voilà un sujet qui revient souvent!
Une fois par an au moins, lorsqu’on ouvre son petit courrier d’appel de primes envoyé par notre cher assureur.
Si le montant annuel des cotisations a eu le malheur encore d’augmenter, il se pourrait même qu’on ait droit au sempiternel:
« Les assureurs, c’est pas compliqué. Ils sont toujours à l’heure pour te réclamer de l’argent. Et quand t’as besoin d’eux, y’a plus personne !».
Qui n’a jamais entendu ou prononcé cette tirade? Un grand classique parmi les sujets de table aux réunions de famille. Et à tatie Ambre d’embrayer: « J’aimerais bien savoir ce qu’ils font de tout l’argent que je leur donne ! »
Et bien, parlons-en… où va tout cet argent?
1 - Comment le montant de mes primes d'assurance est-il fixé?
Pour déterminer combien vous devrez payer en primes chaque année pour:
les assureurs utilisent tour à tour:
- une roulette de casino
- une boule de cristal
- des formules mathématiques qui peuvent porter des noms bizarres (Bernoulli, loi de Poisson, algorithme glouton, théorie des probabilités, binomiale…)
En vérité, si l’on redevient un peu sérieux, tout ce qui a été cité précédemment est … à peu près vrai! On s'explique...
Les assureurs, avant de vous proposer un contrat d’assurance et un montant précis de cotisations, vont faire le pari que:
- vous êtes plutôt prudent et qu’il ne vous arrivera rien de méchant à l’avenir
- vous êtes a priori sérieux et vous paierez toujours à temps vos primes, en restant fidèle très longtemps
- même s’il vous arrive des pépins, vous ne réclamerez probablement pas d’indemnisation
Et si vous n’êtes pas très exemplaire, alors l’assureur peut choisir de ne pas vous assurer du tout, ou d’appliquer des primes (très) élevées.
Toute la nuance tient dans les mots soulignés ci-dessus en gras.
Plutôt. A priori. Probablement pas.
Tout repose dans les probabilités que vous soyez, ou pas, un client rentable à long terme. Et pour obtenir ces fameuses probabilités, une batterie d’informations et de critères précis (qualitatifs et quantitatifs) sont recueillis auprès de chaque client: le fameux questionnaire de souscription notamment, parfois accompagné d’une visite de risque (l’assureur ou son préventeur se rend sur le lieu à assurer, pour juger par lui-même de la valeur des actifs - bâtiments et biens/véhicules, de la conformité des éléments déclarés, des moyens de prévention mis en place, de l’environnement autour du site)…
2 - Une fois mes primes payées, où vont-elles?
Les primes collectées par les assureurs servent:
- A payer des sinistres.
Bah oui! Ca paraît simple, ça paraît évident… Votre assureur n’existe QUE ET UNIQUEMENT pour payer à ses sinistrés des indemnités. Evident peut-être, mais on arriverait presque à en douter, quand on entend parfois un assureur s’exclamer, en arrivant sur les lieux d’un sinistre: « Ah oui quand même! Ohlala combien ça va me coûter tout ça? »… Euh? C’est-à-dire? Rappelez-nous qui a vraiment tout perdu dans l’histoire: vous, ou le sinistré?
- A payer leurs propres frais de fonctionnement.
Locaux, salariés, frais généraux, courtiers et agents qui apportent les affaires, publicités, logiciels, leurs propres primes d’assurance, etc… bref, comme la plupart des sociétés de service. D’ailleurs, il faut savoir que les compagnies d’assurance utilisent le mécanisme de réassurance: cela consiste à s’assurer elles-mêmes auprès d’un autre assureur, qui partagera ainsi les risques financiers.
- A mettre de l’argent de côté, pour les sinistres à venir.
Les compagnies d’assurance ont l’obligation de se constituer des réserves suffisantes pour faire face à leurs engagements contractuels avec leurs clients; et rester solvables.
- A faire des investissements.
Une partie des primes est souvent ré-investie. Dans quoi? La bourse, des obligations, des titres de créance, même de l’immobilier! … Ces investissements sont encadrés par le Code des Assurances: ils doivent être sûrs et ils sont plafonnés (pour ne pas mettre en danger la solvabilité de l’assureur, et par conséquent de tous ses sinistrés). En France c’est l’organisme ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) qui est en charge de surveiller les établissements d’assurance et bancaires, et de superviser leurs placements financiers. Donc, oui, techniquement... votre argent est utilisé pour générer encore plus d'argent!
- A payer certaines taxes appliquées sur les produits d’assurance
Les cotisations d’assurance ne sont pas soumises à la TVA (taxe sur la valeur ajoutée). Par contre, une taxe fiscale est appliquée (qui va elle aussi dans la poche du Trésor Public), ainsi que diverses contributions (sécurité sociale, fonds de garantie, fonds de solidarité…). Cela dépend du type de contrat d’assurance dont on parle. Ces taxes et contributions ne dépendent pas de la compagnie d’assurance, elles sont imposées.
Quelques exemples de taxes fiscales:
- sur le risque incendie, pour les particuliers, la taxe fiscale est de 30%
- sur le risque dommage-ouvrage (hors bâtiments agricoles), la taxe fiscale est de 9%
- sur les risques professionnels et pertes d’exploitation (pour les artisans, industriels et commerçants), la taxe fiscale est de 7%
Quelques exemples de contributions obligatoirement appliquées à certains contrats:
- Contribution solidarité victimes terrorisme infractions au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (en général 5,90€ par cotisation)
- Contribution au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (en général 1,2% de la cotisation)
3 - Mes cotisations augmentent tous les ans, alors que je n'ai rien modifié dans mon contrat, et que je n'ai eu aucun sinistre. Pourquoi?
Avant tout, vous êtes parfaitement dans votre bon droit à demander des justifications claires à votre courtier ou votre assureur, si vous constatez une augmentation de cotisations que vous ne vous expliquez pas.
D’ailleurs, si vous êtes un particulier, sachez que la loi Hamon vous protège et vous permet de résilier votre contrat à tout moment, après les 12 premiers mois de souscription.
Revenons à notre augmentation de tarif: si les révisions de tarifs ne sont pas prévues dans votre contrat (lisez les conditions générales de votre contrat, pour être sûrs), alors la compagnie n’a tout simplement pas le droit de changer le tarif sans votre accord.
Si le contrat prévoit par contre une possibilité de révisions de tarif à la hausse, il doit être spécifié le pourcentage d’augmentation au-delà duquel vous avez le droit de résilier votre contrat, même en cours d’année. La résiliation doit se demander dans les 30 jours qui suivent la notification de changement de tarif (il vaut mieux prévoir un envoi en recommandé avec accusé de réception).
Quoi qu’il en soit, la hausse des tarifs est susceptible d’être engendrée par:
- les coûts de construction qui augmentent (les indices du bâtiment), ou les pièces automobiles par exemple
- la santé financière de votre assureur (d’où l’intérêt de surveiller les placements financiers ou boursiers qui sont faits, ou encore de choisir un assureur solide sur sa gestion)
- l’inflation
- la sinistralité et les aléas dans votre région ou dans le pays, etc.
4 - Je n'ai jamais de sinistre, mon assureur ne devrait-il pas me rembourser mes cotisations non utilisées?
Aaaah ce serait merveilleux… Et d’ailleurs cela existe: cela s’appelle le cashback, que très peu d’assureurs pratiquent.
A titre d’exemple, l’assureur Lemonade a une politique de giveback: l’argent des cotisations de ses assurés, dès lors qu’il n’a pas servi à payer des sinistres, ou à couvrir les frais de fonctionnement de l’assureur, sont donnés à l’oeuvre caritative ou l’association du choix du client (mais ça ne repart pas dans la poche dudit assuré, dommage).
D’autres initiatives progressistes, suggèrent de s’assurer en P2P (peer-to-peer) ou en mode participatif, pour profiter entre autres de cashback. La règlementation planche sur le sujet (le plus gros écueil étant la solvabilité d’un tel système, en l’absence d’établissement d’assurance qui en assure la solidité financière), il y a fort à parier pour que cela devienne possible et concret dans les années à venir.
En tous les cas, rien n’empêcherait les compagnies actuelles d’innover en ce sens.
5 - Puisque je n’ai jamais de sinistres, est-ce que je ne ferais pas mieux de garder mon argent et de le placer au chaud sous mon matelas, ou de le faire fructifier, pour le jour où j’en aurai besoin?
C’est tentant… mais ça reste une mauvaise idée, à notre avis.
Déjà parce que certaines assurances sont strictement obligatoires (l'assurance auto au tiers, par exemple, l'assurance dommage ouvrage pour une construction, l'assurance habitation lorsqu'elle est - quasiment toujours - exigée par votre bail...)
Mais surtout... c'est la faute aux probas, encore une fois!
Certes, il est possible de passer toute une vie sans jamais avoir à faire la moindre réclamation d’indemnisation à aucun assureur. Dans ce cas, les primes payées n’auront-elles servi à rien? Pas tout à fait…
- elles servent à d’autres assurés moins chanceux que vous (c’est le beau principe de la mutualisation)
- même en étant le plus vertueux possible, et sans sortir de chez soi… le sinistre peut venir d’éléments extérieurs incontrôlables (cyclone, séisme, un tiers qui endommage vos biens, émeutes, vol…)… il est donc possible qu’un sinistre vous tombe dessus, alors même que vous n’aviez eu le temps de mettre que 1 ou 2 mois d’équivalent de primes sur un compte épargne
- et quand bien même: faisons l’exercice jusqu’au bout. Imaginons que vous commenciez à épargner à 18 ans la somme de 75€ par mois (la cotisation moyenne en France pour assurer une petite maison et une petite voiture). Arrivé vers la fin de votre belle vie sans nuages, à 99 ans… crac! Le feu prend dans le boitier de recharge de votre fauteuil roulant électrique et enflamme toute la maison. Auriez-vous suffisamment sur votre compte en banque pour financer une reconstruction de maison à l’identique (et tout le contenu mobilier qu’il y avait dedans)?
Faisons le calcul!
75€ x 12 mois x (99 ans - 18 ans +1) = 73.800€… cela semble un peu maigre, vous en conviendrez!
Même si on rajoute un joli taux d’intérêt de 2,5% par an pendant 82 ans… on obtient…239.309€. Ce qui est à peine suffisant pour payer les déblais et démolition des ruines de l'incendie, reconstruire aux nouvelles normes et avec le cours des matériaux actuel, rémunérer un maître d'ouvre, payer ses assurances obligatoires, rééquiper et remeubler la maison à neuf!
A bon entendeur… il vaut toujours mieux s'assurer. Le tout est de BIEN s'assurer, et pas à n'importe quel prix.
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